La Genèse des Chevaliers

 

Les chevaliers et la noblesse

Jusqu’au Xe siècle, les chevaliers n'étaient que de simples soldats de cavalerie, nommés " miles " ; et la société les distinguait nettement des nobles. A partir du XIe siècle, l'Eglise, qui exalte la condition chevaleresque, incite les nobles d'un niveau social de plus en plus élevé à entrer dans la chevalerie : les chevaliers sont alors, soit des non-nobles nourris au château de leur seigneur, soit des cadets de noble lignée, possesseurs de quelques fiefs.

Au XIIe siècle, le prestige de la chevalerie est immense : le chevalier représente la respectabilité et a de plus en plus de pouvoir, possédant à son tour des vassaux et des terres de plus en plus grandes. L'éthique chevaleresque et le mode de vie noble se fondent au sein d'une nouvelle classe sociale, résultant de la fusion entre noblesse de robe et noblesse d’épée.

Cependant, si le processus de chevalerie fait partie de l'aristocratie, la chevalerie n'est pas héréditaire : elle s'acquiert par l'adoubement et se mérite par le respect d'une éthique qui repose essentiellement sur la prouesse et la largesse.

La prouesse associe vaillance et loyauté : vaillance dans le combat, mais aussi dans la vie quotidienne. Loyauté envers son seigneur, son roi, sa dame... La largesse comprend la prodigalité, la générosité, le faste. Dépenser sans compter, mais aussi être généreux envers ses adversaires, envers les faibles, tel est le code de l'honneur chevaleresque. Le chevalier a maintes occasions de prouver ses qualités, dans les tournois ou à la guerre, à la croisade ou dans les fêtes, sur les chemins ou auprès des dames, dans les châteaux.

 

L’adoubement d’un chevalier

Jusqu'au XIe siècle, l'adoubement (mot qui pourrait provenir du verbe francique dubban : frapper) est une cérémonie très simple, qui coïncide généralement avec une fête religieuse. Au XIIe siècle, il devient une cérémonie fastueuse et très populaire. Sacralisé par l'Eglise, il équivaut à un nouveau baptême.

Reçu au château de son futur suzerain, dont il deviendra vassal ; le jeune écuyer voulant devenir chevalier, prend, en premier lieu, un bain purificateur sous le regard d'un homme d'église. Il doit ensuite se recueillir, jeûner toute la journée, et prier toute la nuit précédant l’adoubement.

Au matin de la cérémonie, le jeune homme assiste à la messe et communie. Il est alors emmené par des moines et des serviteurs, qui l'habillent et lui donnent les dernières recommandations. Ces préparatifs ont pour but de laisser un temps de réflexion au postulant et de le purifier. Celui-ci doit être parfaitement sûr du choix de sa " destinée " lors de la cérémonie. Son engagement est à vie, et le serment qu'il prononce, inviolable sous peine de mort.

Dans la salle principale du château, en présence de sa famille, des seigneurs voisins et de ses camarades, le jeune écuyer prête serment à son seigneur. Il lui promet fidélité et loyauté à vie. Il reçoit alors son épée, le symbole de son rang, des éperons symbolisant son droit à posséder et dresser un cheval, son bouclier et ses armoiries.

Pour clore la cérémonie, le futur chevalier reçoit la " colée " : une gifle dont il était d'usage de dire que c'était la dernière qu'il recevait sans la rendre. Il s’agit en fait d’un coup asséné du plat de la main sur le cou ou la nuque. La colée se transforme, à la fin du Moyen Age, en " accolade ", coup donné du plat de l’épée sur l’épaule du futur chevalier.

Alors, musiciens, jongleurs et acrobates envahissent la salle, pendant que tout le monde s'attable pour le banquet.
La journée se poursuit dans la liesse, ponctuée de joutes et de passes d'armes, jusqu'au soir, où le nouveau chevalier quitte le château de son seigneur.

L’épée : arme par excellence du chevalier

L’épée est l'arme par excellence du chevalier et de l'homme d'arme du Moyen Age. Son origine remonte à la plus haute l'antiquité et même sans doute à l'âge du bronze. Les Grecs et les Romains utilisaient des épées plutôt courtes (60 centimètres environ) d'abord en bronze puis en fer. Toutefois, leur qualité n'était pas excellente.

L'usage de l'épée longue (environ 90 centimètres), semble débuter à l'époque Franque et plus spécialement Carolingienne. A partir de cette période, l'épée devint l'arme la plus noble ; son pommeau creux renfermait même parfois des reliques. L'épée était donc très importante pour le chevalier qui la possédait, elle portait souvent un nom (la plus célèbre est Durandal, l'épée de Roland). Parfois même il lui parlait comme à un compagnon, et préférait la briser quand la fin était proche, plutôt que de voir un ennemi s'en emparer.

Pendant le Moyen Age, les mots " branc " et " épée " sont employés pour désigner cette arme. On nommait la lame alemelle ou lumelle ; la poignée le helz, l'endeure, l'enheudeure ou encore le heut ; le pommeau était nommé le pont ou le plommel ; la garde se disait l'arestuel ou les quillons ; et le fourreau s'appelait le fourrel ou le fuere. Quand on frappait par le tranchant, on parlait d'un coup de " taille ", tandis que si c'était une tentative qui visait à planter l'épée dans son adversaire, il s'agissait d'un coup " d'estoc ". Ce genre de coup était interdit en joute (le but des joutes n’était pas de s'entretuer, mais de montrer le potentiel au combat des chevaliers).

Jusqu'au XIIe siècle, l'épée utilisée pour la taille, qui possédait deux tranchants, se terminait par un bout plutôt arrondi. A la fin du XIIe siècle, la poignée devient assez longue pour permettre de se servir de l'arme à deux mains. Ensuite, la forme de l'épée ne se modifie guère jusque vers le milieu du XIIIe siècle. A cette époque, on distingue deux types d'épées : les épées à lames légères, utilisées de taille et d'autres à lames lourdes, plus courtes et destinées à des coups d'estoc. Les chevaliers en possédaient souvent une de chaque, la première utilisée à cheval et la seconde pour le combat à pied. Au XVe siècle, les armées donnant un rôle important à l'infanterie, équipèrent leur fantassins de grandes épées à deux mains pouvant atteindre jusqu'à 1m65. Elles étaient utilisées pour faire des ravages contre les escadrons de cavalerie. L'épée perdit de son importance lors du combat avec l'avènement des armes à feu portatives et cessa d'être une arme de guerre dès le XVIe siècle. Elle fut remplacée par le sabre dans la cavalerie.

 

L’idéologie " chevaleresque "

Si l’éthique chevaleresque a pu apparaître rétrospectivement comme intemporelle et invariable, elle s’est en fait constituée dans la confrontation de multiples valeurs, militaires, religieuses ou païennes ; valeurs qui seront sublimées en un idéal si pur qu’il deviendra universel… et presque utopique. Cette idéologie " chevaleresque " s’est formée peu à peu, sous l’influence de l’Eglise, de la noblesse, d’un code déontologique et de la littérature.

L’Eglise cherche d’abord à limiter les méfaits des seuls guerriers, en mettant les chevaliers au service de sa cause, et en en faisant des défenseurs de la chrétienté, des veuves et des orphelins.

La noblesse souligne les idéaux de service et de fidélité au seigneur, et développe une idéologie aristocratique anti-roturière en flattant l’orgueil de caste des chevaliers.

Le code déontologique forgé dans les guerres et les tournois, valorise le combat à la lance et à l’épée, condamne l’usage des armes de trait (à projectiles), interdit aux chevaliers d’achever un adversaire blessé ou désarmé criant " merci ", réglemente les pratiques de rançon ou de butin, et, accroît le sens du compagnonnage.

La littérature, pour sa part, introduit dans le monde brutal de la chevalerie, la dimension féminine en valorisant les vertus de l’amour courtois.

A partir du XIVe siècle, ceux qui ne se conforment pas à ces pratiques sont exclus de la chevalerie.

 

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